EXTERIEUR, JOUR, AU BORD DU LAC.
Perceval est assis au bord de l'eau, un bâton en guise de canne à pêche, un fil plongeant dans l'eau. Arthur arrive à son tour et s'asseoit sur un rocher.
ARTHUR : Vous êtes là, vous ?
PERCEVAL : Ca va, Sire ?
ARTHUR : Je savais pas que vous pêchiez…
PERCEVAL : Ah non, non, je pêche pas.
ARTHUR : Vous pêchez pas ?
PERCEVAL : Ah non, j'aime pas ça, la pêche.
ARTHUR : (Intrigué) D'accord oui…
PERCEVAL : Ah mais c'est à cause de la canne, c'est ça ?
ARTHUR : C'est-à-dire oui on a… on a tout de suite envie de penser à la pêche.
PERCEVAL : Ah non, mais c'est juste une canne et un fil.
ARTHUR : Une canne et un fil ?
PERCEVAL : Et un caillou au bout du fil pour tendre le fil.
ARTHUR : Ah parce que c'est important tout de même que le fil soit tendu ?
PERCEVAL : Ah beh oui, quand même, sinon c'est n'importe quoi.
GENERIQUE
MEME ENDROIT. PEU DE TEMPS APRES.
Arthur s'est assis non loin de Perceval qui tient toujours sa canne. Tous deux discutent, les pieds dans l'eau.
PERCEVAL : Je sais pas comment vous expliquer… ça me détend.
ARTHUR : Non, non. Ca me pose pas de problème particulier.
PERCEVAL : Il y en a qui picolent, d'autres qui se battent à l'épée… moi je fais ça. Au moins je fais de mal à personne.
ARTHUR : Ben non, même pas aux poissons.
PERCEVAL : Des fois j'y pense à eux.
ARTHUR : A qui ? Aux poissons ?
PERCEVAL : Ouais. Je me demande s'ils sont pas un peu déstabilisés, avec toute cette histoire.
ARTHUR : Les poissons, déstabilisés ?
PERCEVAL : Je sais pas… Je me dis qu'ils peuvent peut-être mal le prendre. Ils doivent se dire : "un mec qui nous appâte avec des gadins, il nous prend vraiment pour des cons".
ARTHUR : Oui, ou alors ils se disent que vous ne comprenez vraiment rien du tout à la pêche, et c'est eux qui vous prennent pour un con.
PERCEVAL : Ouais, peut-être. Mais de toute façon je men fous, je viens pas pour eux. Eux, c'est "bonjour-bonsoir" et c'est tout.
ARTHUR : Sans indiscrétion, vous venez pour quoi exactement ?
PERCEVAL : Je sais pas.
ARTHUR : Vous savez pas ?
PERCEVAL : Non. Enfin… si, mais… je sais pas si je dois vous le dire.
ARTHUR : Ah beh, c'est comme vous voulez ça.
PERCEVAL : En fait, c'est un peu pour faire comme vous.
ARTHUR : Pour faire comme moi ?
PERCEVAL : Ouais. Tout le monde le sait que vous venez ici. Les gens ils se disent que c'est là que vous pensez au Graal et tout. Comme le lac est magique, vous venez ici pour réfléchir et ça vous fait comprendre des trucs. C'est vrai ou pas ?
ARTHUR : Oui, y a un peu de ça, oui. C'est pas formel mais…
PERCEVAL : Beh voilà. Moi je me suis dis que si c'est ici qu'on comprend les trucs, autant que j'essaye.
ARTHUR : Mais qu'est ce que vous essayez de comprendre comme truc, exactement ? Le Graal ?
PERCEVAL : Ouais, le Graal par exemple, ou la table ronde enfin… ou n'importe quoi. Je pige jamais rien à rien… C'est pas les sujets qui manquent.
ARTHUR : Vous savez, le Graal… la table ronde, j'ai pas tout pigé non plus, hein…
PERCEVAL : Ah non ?
ARTHUR : Ah non. C'est pour ça, c'est vrai, j'essaye de venir ici pour…pour essayer d'y voir clair, de faire une sorte de point de temps en temps.
PERCEVAL : Et ça marche ?
ARTHUR : Pas forcément. Pas toujours.
PERCEVAL : Moi, la canne, ça m'aide… Je visualise le caillou dans l'eau. J'ai l'impression de faire partie d'un tout. Moi, le caillou, le fil, le lac, le ciel. C'est entier, vous comprenez ? C'est bien fini… C'est pour ça, moi je me dis : "c'est dans ces moments là qu'on peut bien comprendre les trucs". Vous me prenez pour un con, non ?
ARTHUR : Pas du tout. (Pause) Les poissons, eux en revanche, vous prennent certainement pour un con. Mais enfin les poissons sont assez cons eux même, donc…
PERCEVAL : Ouais, ça compte pas ?
ARTHUR : Non. (Pause) Ah ! (Montrant du doigt un mouvement dans l'eau) Ah, ben non, c'est vrai qu'il n'y a pas de… non, c'est rien, c'est rien…
GENERIQUE
MEME LIEU. PLUS TARD.
Arthur tient aussi un bâton en guise de canne et il "pêche" en compagnie de Perceval.
PERCEVAL : Ah ça y est ! Je viens de comprendre à quoi ça sert la canne.
ARTHUR : Soyez gentil d'éclairer ma lanterne, parce que pour moi, je vous avoue que ça reste quand même assez flou.
PERCEVAL : En fait ça sert à rien.
ARTHUR : … Ah.
PERCEVAL : Du coup, ça nous renvoie à notre propre utilité : …
PERCEVAL (voix off) : … L'homme face à l'absurde.
Rédigé par Ubik3 pour Kaamelott Hypnoséries