Chambre royale.
Arthur dort, tandis que Guenièvre lit un parchemin en se récitant quelque chose en vain. Elle se tourne vers son mari.
Guenièvre (hésitante, chuchote, le secoue légèrement) : Hé ! (Pas de réponse, elle le secoue plus fort) Hé !
Arthur se réveille en sursaut.
Arthur (paroles incompréhensibles) : Quoi ?
Guenièvre : Vous dormez ?
Arthur : Quoi ? …. Mais évidemment que je dors ! Je joue pas aux fléchettes !
Guenièvre : Vous pouvez me rendre un service ?
Arthur : Non !
Guenièvre soupire.
***
Générique
***
Même lieu, mêmes personnes.
Guenièvre : Je dois réciter ce poème demain à la Fête des fleurs !
Arthur (exaspéré): Qu'est-ce que vous voulez que ça me fasse ?
Guenièvre : J'arrive pas à le retenir !
Arthur : Si vous arrivez pas à retenir un poème, pourquoi vous en récitez un demain ?
Guenièvre : Ben je croyais que ce serait plus facile, c'est sur la nature...
Arthur : Ah, parce que quand c'est sur la nature, c'est plus facile ?
Guenièvre : Bah finalement non …
Arthur : Bon, bah voilà. Vous chanterez une chanson et c'est marre. Laissez-moi dormir !
Guenièvre : Oh, vous pouvez bien me donner un coup de main !
Arthur : Je suis crevé, je me lève tôt, j'ai autre chose à foutre que de réciter des poèmes jusqu'à deux heures du matin !
Guenièvre : Mais je vous demande jamais rien !
Arthur : Hé ben voilà, continuez comme ça ! (Il se recouche)
Guenièvre : Si demain je suis ridicule ce sera de votre faute hein !
Arthur : Oui bah ça fera pour toutes les fois où vous êtes ridicule et que j'y suis pour rien.
Guenièvre : Oh, écoutez je vous demande pas grand-chose, je vous demande une heure !
Arthur : Une heure ?
Guenièvre (air malheureux) : Une petite heure...
Arthur soupire, alors que Guenièvre reprend son parchemin.
***
Même lieu, mêmes personnes.
Arthur aide finalement Guenièvre.
Guenièvre : (Déclame son poème d'une voix voulue grandiloquente mais en réalité ridicule devant un Arthur qui n'en peut plus) : Le vent... pareil à l'enfance, se joue de l'arbre moqueur...
Arthur soupire bruyamment.
Guenièvre : Quoi ? C'est pas ça ?
Arthur (gros yeux) : Si, si, si...
Guenièvre : Bah alors ?
Arthur : Bah alors quoi ?
Guenièvre : Pourquoi vous soupirez ?
Arthur : Non mais c'est rien c'est le poème c'est …
Guenièvre : Le poème qu'est-ce qu'il a le poème ?
Arthur (craque) : Il est zéro ! Voila ce qu'il a !
Guenièvre : Non, mais vous êtes gonflé, hein !
Arthur : Non mais c'est bon là, j'en ai rien à foutre, enquillez, j'ai pas envie qu'on y passe la nuit. Allez !
Guenièvre (sèchement) : On peut savoir ce que sire Arthur de Bretagne trouve à redire quant au choix du poème que je dois réciter demain et qui m'a pris un temps fou ?
Arthur (moqueur) : ça vous a pris un temps fou de choisir ça ?
Guenièvre : Parfaitement !
Arthur (rire moqueur) : Bah, ma cousine... (soupir et regard moqueur)
Guenièvre : Mais je vous en prie, éclairez-moi de vos lumières puisque vous êtes soudainement devenu un expert en beau langage....
Arthur (la coupe) : Oh y a pas besoin de devenir un expert s'il vous plaît ! (Il montre un endroit sur le parchemin) « Le vent pareil à l'enfance se joue de l'arbre moqueur » ?
Guenièvre : Ben oui, et ben ?
Arthur : Hé ben, c'est nul. Nul, nul, nul, zéro. L'arbre moqueur... déjà, ils peuvent pas s'empêcher de foutre des épithètes à tout ce qui bouge les poètes ! Même à ce qui bouge pas ! Hein ! (moqueur) "La fleur goguenarde", "l'abeille malicieuse", "le roseau pliable", "l'ourson rabat-joie". Et même des fois, ils le mettent avant le mot, comme ça, ça fait genre : (prend la voix d'un poète) "le gai souriceau", "le prompt madrigal", "la frisottée moustache"...
Il secoue la tête d'un regard exaspéré.
***
L'instant d'après.
Guenièvre (furieuse): Je trouve révoltant de votre part de mettre systématiquement tout en œuvre pour me décourager !
Arthur (exaspéré) : Enfin vous allez quand même pas dire que c'est pas des conneries ? Est-ce que je vous dis moi "passez-moi la blanche sauce" ? Non ! (Guenièvre lève les yeux au ciel) "Tiens c'est bon, ça qu'est-ce y a dedans. De la hachée viande et des secs raisins" ?
Guenièvre : Mais vous ne comprenez rien à rien ! C'est une licence poétique !
Arthur : Non ! Non, non, non, je suis désolé, y a trop de clampins qui se disent poètes, qui sortent la licence poétique dès qu'ils pondent trois merdes que personne comprend !
Guenièvre : Ah, mais je suis désolée, moi je comprends !
Arthur : Mais non !
Guenièvre : Enfin en tout cas, ça me dérange pas !
Arthur : ça vous dérange pas ?
Guenièvre (moqueuse) : Vous avez peut-être mieux à proposer ?
Arthur la fixe un instant d'un regard noir en réfléchissant.
Arthur : Au printemps le sommeil ne cesse dès l'aurore. Partout se font ouïr les gazouillis d'oiseaux. La nuit s'achève enfin dans le souffle des eaux. Qui sait combien de fleurs seront tombées encore ?
Silence, regard estomaqué de Guenièvre.
Arthur : Ah beh oui, là oui, là bien sûr, c'est sûr c'est du chinetoque hein, les mecs ils se raclent un peu la soupière avant de sortir n'importe quelle connerie, hein. (Il pousse un rire moqueur et fier avant de se recoucher sous le regard ahuri de Guenièvre).
***
Générique
***
Même lieu, mêmes personnes, un peu plus tard.
Guenièvre : "Qui sait combien de fleurs seront tombées encore ?"
Arthur (regard las et exaspéré) : Voilà ! Bon allez, c'est bon, on peut dormir maintenant ?
Guenièvre : Je peux vous poser une question ?
Arthur : Quoi ?
Guenièvre : Qu'est-ce que ça veut dire, « La nuit s'achève enfin dans le souffle des eaux. » ?
Arthur : C'est une licence poétique.
FIN
Rédigé par Choup37 pour Kaamelott Hypnoseries